La palette de couleurs de Stéphanie Lapointe
Sur Donne-moi quelque chose qui ne finit pas, Stéphanie Lapointe voulait alterner les teintes chaudes d'une humanité qu'elle se plaît toujours à décortiquer à l'aide d'un œil tendre et d'un cœur éthéré…
Stéphanie a une fois de plus travaillé avec ses musiciens fétiches, Joseph Marchand et Mélik-Alexandre Fahrat, afin de sortir son album le plus abouti. Elle était dans nos bureaux ce matin pour en partager les richesses. Désert: Stéphanie avait envie d'une première plage de style "générique de film" sur laquelle les couleurs s'installent. «On a chacun nos façons d'aimer et pour moi, c'est difficile d'en parler car c'est un sujet personnel. Mais grosso-modo, c'est un constat où je me demande si j'ai mal aimé ou si on m'a mal aimée…» On est loin: «C'est l'histoire de deux personnes, mon histoire, quand la rupture ne se fait pas toujours bien. C'est une bouteille à la mer cette chanson-là, un appel à se dire combien de fois on peut dire "je t'aime"? Est-ce qu'on peut donner son cœur plusieurs fois?» Eau salée: Une des deux chansons écrites par Pierre Lapointe et Philippe Bergeron. «Quand Pierre et Philippe sont venus en studio écouter Une fleur, une autre chanson écrite pour moi, j'espérais qu'il m'en donne une autre, mais je n'osais pas. Finalement, Pierre m'a dit qu'il en avait une qu'il a écrite ado!, confie Stéphanie. J'aurais aussi trouvé ça dommage de pas avoir une chanson avec ce thème-là sur l'album, soit se donner la chance d'avoir une autre page blanche, une autre histoire. C'est une chance qu'on a d'aimer et quand on a trouvé l'amour de sa vie et que ça ne marche pas, on se demande si on en aura un autre…» Petit garçon en habit d'homme: Contrairement à ce que plusieurs pourraient penser, à cause du voyage au Darfour de Stéphanie Lapointe, cette chanson ne parle pas d'enfants-soldats. «Non, en fait c'est moi qui avait l'impression de courir après quelqu'un qui n'était jamais là quand j'en avais besoin. Suffit de perdre une fois quelqu'un pour comprendre que les gens ne nous sont pas acquis…» Bang Bang: Le classique de Sonny Bono trottait constamment dans la tête de Stéphanie Lapointe. «Elle est arrivée à la fin du projet. Je l'aime à cause de mon histoire, de ce qu'elle évoque pour moi, cette image de la fille qui traîne un bagage sur ses épaules toute sa vie. Je voulais la reprendre et lui donner une couleur, garder le classique tout en ayant une teinte assez contemporaine», explique-t-elle. Rose transparente: «Je l'ai écrite un soir où je devais sortir, mais je ne feelais pas, je feelais "pantoufle"… Je suis restée couchée avec des livres, des papiers, toute la soirée. J'avais besoin d'un refuge. Tu sais, on est toujours entouré par des gens, par la télé… Ce n'est pas du tout égoïste, mais plus je vieillis et plus j'ai besoin de ça.» Une fleur: «La première que m'a écrite Pierre Lapointe. Je n'ai pas eu de grosses discussions, je voulais une chanson d'amour. J'ai bien aimé la métaphore de la fleur qui pousse sur le cœur. Ça m'a fait penser à un texte de Boris Vian, un de mes préférés, quand il dit qu'il a un nénuphar sur le cœur. C'est une image pleine et belle!» À quoi: Texte créé par l'auteur français Albin de la Simone, un être qui captive Stéphanie. «C'est un excentrique calme, une personne fascinante. Je voulais qu'il m'écrive une chanson jouée par deux personnes dans l'intimité, c'est tout ce que je lui ai dit.» Les paroles mettent en scène deux amis qui ont cédé à la tentation et qui posent une grande question existentielle à l'auditeur: peut-il y avoir de l'amitié entre un homme et une femme? L'île: «Le 1er texte de l'album! Il est inspiré du film L'île aux fleurs de Jorge Furtado. C'est l'histoire d'une tomate qui part du Mexique et qui s'en va jusque dans un dépotoir en Amérique du Sud. Ce dépotoir est une île où, entre autres, les habitants mangent ce que les cochons leur laissent…» Ces tableaux misérables ont rappelé de vilains souvenirs du Darfour à Stéphanie, où les enfants sont laissés à eux-mêmes dans les amas de détritus… Nus sous les étoiles: «Je voulais écrire une chanson pour la personne avec qui je suis maintenant. Avec le quotidien, on a un peu oublié d'où nous venions, alors c'était pour recréer les bons moments…» Rose (au piano): «Une petite pause, la chanson la plus instinctive que j'ai jamais faite. J'ai repris les accords de Rose transparente que j'ai rejoués de la main droite.» Au nord de moi: «Je me demande si c'est une chanson ou un "exercice". Quand Pierre Lapointe l'a entendue, il trouvait que c'était un exercice, car j'empile les mots les uns sur les autres jusqu'à la fin. Le mot qui décrit cette chanson pour moi est "désir": "Ton cœur qui bat au nord de moi, mais je l'ai pas…"», glisse-t-elle.